Etre ou ne pas être un préjudice écologique

ParJDA

Etre ou ne pas être un préjudice écologique

art. 359.

par M. Marc Benoist
Doctorant en droit public,
Université Toulouse 1 Capitole, IMH

« Dôme de chaleur »[1]. La puissance de l’expression laisse deviner l’écrasante réalité qu’elle désigne, cette oppressante et inévitable force qui s’insinue jusque dans les foyers les mieux climatisés pour ramener l’être humain à la précarité de sa survie sur la planète qui l’a vu naître. Quant à l’origine du phénomène, seuls les plus téméraires se refusent encore à le nommer tandis que les autres l’ont tous sur le bout des lèvres : le réchauffement climatique. Seulement voilà, la rengaine écologiste n’est plus qu’une simple incantation tout juste bonne à effrayer les plus jeunes et à désintéresser les plus âgés. Le réchauffement est là, tangible, dans l’eau qui s’évapore et assèche les sols, dans les nuages qui se rassemblent et noient les habitations, dans les terrains qui glissent et emportent avec eux la vie des riverains. Comme une invisible prison de verre qui se révèle lorsque la mouche en heurte les bords, le piège du réchauffement climatique se referme peu à peu sur les humains qui s’agitent encore. Tandis que certains s’abîment dans leur ignorance entretenue, et que d’autres s’aveuglent face à la vérité dérangeante, surgit au milieu de la mêlée le sursaut de nombreux déterminés à identifier les responsables et à leur faire adopter des solutions efficaces.

« L’Affaire du Siècle », élan militant, est à ranger parmi les procès climatiques[2] qui apparaissent et semblent devoir se multiplier partout dans le monde. Désireuses de voir l’Etat mis face à ses obligations dans la lutte contre le réchauffement climatique, quatre associations requérantes se sont vues reconnaître l’intérêt à agir en responsabilité pour préjudice écologique devant le tribunal administratif de Paris. Sous une appellation intrigante, dont on ne sait a priori si elle vient châtier les excès du XXème siècle ou prétend s’illustrer dans le jeune XIXème siècle, la volonté manifeste est d’obtenir du système judiciaire qu’il contraigne les dirigeants politiques à une action de lutte contre le réchauffement climatique plus ambitieuse et engagée. L’affaire vient après une saisine du Conseil d’Etat qui attaque elle aussi la trajectoire de réduction des gaz à effet de serre adoptée par le gouvernement. L’excès de zèle entre les deux ne manquent pas de s’illustrer par une revendication toujours plus renforcée au droit de s’appeler la « décision historique » alors que si les requérants ne sont pas les mêmes, les associations qui suivent avec intérêt le résultat des deux procédures sont identiques. En laissant de côté la prétention mémorable, il est indéniable que les procès climatiques sont l’écho d’une prise de conscience croissante de l’opinion publique sur les problématiques environnementales, ainsi que l’attestent les marches pour le climat, la Convention citoyenne ou encore la loi adoptée par le Parlement[3]. Les juges eux-mêmes ont progressé dans leur prise en compte de l’environnement, à l’image du Conseil constitutionnel qui le reconnaît maintenant comme « patrimoine commun de l’humanité »[4]. Reste que, depuis plus d’un siècle déjà, les juristes savent que la responsabilité de l’Etat « n’est ni générale, ni absolue ; qu’elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’Etat avec les droits privés »[5]. S’appuyer, comme le font les requérantes, sur un régime de responsabilité de droit civil pour poursuivre LA personne morale de droit public du fait de sa carence à agir contre le réchauffement climatique nécessitait une dose d’optimisme et un volontarisme remarquables.

En faisant mentir les plus sceptiques[6], l’Affaire du Siècle a réussi à faire reconnaître devant le juge administratif la responsabilité de la France dans le préjudice écologique du réchauffement climatique. L’exploit n’échappe pas à quelques écueils, le plus notable sans doute étant celui de l’intérêt à agir et du préjudice moral des requérantes qui deviennent confusément identiques. D’autres l’expliquent de manière efficace[7], la raison de ce curieux résultat vient de la transposition du préjudice écologique, régime de droit civil, devant le juge administratif, qui a sa façon de concevoir la responsabilité administrative. C’est pourquoi se sont mélangés l’intérêt à agir reconnu largement dans la lettre du préjudice écologique et celui reconnu traditionnellement par le droit administratif au titre des associations comme étant un intérêt collectif lésé. Le résultat est à la fois fortuit et insatisfaisant. Si d’un côté il facilite la reconnaissance des prétentions des requérantes, il le fait en mettant au même niveau des associations qui pourtant n’ont ni le même statut ni exactement la même activité. De l’autre, le jugement rejette les interventions d’associations, notamment de défense de l’agriculture ou du droit au logement, tout en reconnaissant que ces thématiques sont bien directement concernées par le réchauffement climatique. La cohérence de la solution souffre peut-être de l’inégalité dans la qualité des requêtes. Reste qu’il ne s’agit là que d’un point de procédure qui n’intéressera pas tant ceux qui sont venus pour le coeur de l’affaire qui demeure avant tout la question de savoir quels moyens sont à la disposition des justiciables pour contraindre l’Etat à agir dans la lutte contre la menace environnementale.

De ce point de vue, les requérantes ont fait feu de tout bois, allant jusqu’à créer de toute pièce des instruments de droit foncièrement ambitieux. Ainsi se démarquent « une obligation générale de lutter contre le changement climatique » fondée sur la Charte de l’environnement et un « principe général du droit de chacun de vivre dans un système climatique soutenable, exigence préalable à la promotion du développement durable et à la jouissance des droits de l’homme pour les générations actuelles et futures » qui « résulte tant de l’état général du droit, international et interne, que des exigences de la conscience juridique du temps et de l’Etat de droit ». L’un et l’autre partagent cette volonté criante de rassembler l’arsenal juridique le plus étendu pour définitivement coincer l’Etat et lui faire adopter une législation à la hauteur des attentes, non seulement des requérantes, mais aussi des experts sur les rapports desquels tous se basent jusqu’aux juges. A cet égard, l’Affaire du Siècle est une démonstration de la complexité avec laquelle les décisions de justice peuvent être rendues lorsqu’elles se penchent sur des phénomènes essentiellement extérieurs au milieu du droit. Pour ce qui est du réchauffement climatique, il est manifeste qu’au-delà de son existence, reconnue unanimement sur la base des rapports d’experts, l’identification de ses causes et des moyens de lutte contre lui cristallise la tension créée entre les requérantes et les juges. Alors que les premières s’attaquent tout à la fois aux objectifs fixés par la loi française et aux mesures prises sur l’émission de gaz à effet de serre, l’efficacité énergétique, la part d’énergie renouvelables, le transport, le bâtiment et l’agriculture, le tribunal recentre son attention sur la seule émission de gaz à effet de serre, au détriment donc des autres « politiques sectorielles »[8] qui ne sont pas retenues pour l’examen de la responsabilité. De la même façon le tribunal évite le piège du droit européen des droits de l’Homme en ne se fondant pas sur les articles de la Convention pourtant utilisés par les associations. La précaution lui permet de ne pas avoir à se prononcer sur l’obligation positive qui découle de l’article 2[9] et pourrait être appliquée au réchauffement climatique grâce à un effort d’appréciation particulièrement souple[10]. Il ne faut pas en douter, loin du battage médiatique dont elle peut faire l’objet, l’Affaire du Siècle est bien une décision prise avec mûre et mature réflexion.

Si GreenPeace France, Oxfam, l’association Notre Affaire à Tous et France Nature Environnement, les requérantes, sont reconnues assez maladroitement dans leur intérêt à agir et leur préjudice moral, elles peuvent se satisfaire d’avoir su amener à prendre pied là où le gouvernement perdait le sien. Le doute pourtant était permis tant la technique du préjudice écologique était à la fois si intuitivement liée au réchauffement climatique et si techniquement complexe à manier dans ce sens.

Le tribunal ne manqua pas, en reconnaissant la responsabilité de l’Etat dans la réalisation du préjudice que constitue le réchauffement climatique, de faire entrer la justice française dans l’une des problématiques majeures du monde contemporain. Le jugement allie l’expertise scientifique et la technique juridique au profit d’une véritable prise de conscience écologique (I) et tente de livrer une solution adaptée, fruit d’une réflexion manifestement impactée par l’enjeu auquel elle est confrontée (II).

I/ L’affirmation claire d’une prise de conscience écologique

Le juge administratif dans sa décision se saisit des questions environnementales sans ambiguïté en reconnaissant la réalité du réchauffement climatique. C’est bien la réception de ce phénomène en droit qui suscite toutes les attentions (A) accompagnée de son corollaire non moins important qui est la responsabilité imputable à l’Etat dans sa survenance (B).

A. La traduction juridique d’un réchauffement climatique

Atmosphère ? Est-ce que j’ai une tête d’atmosphère ? L’application du préjudice écologique à la problématique du réchauffement climatique paraît assez intuitive pour ce qui est à la fois la conséquence et la cause d’atteintes aux fonctions des écosystèmes[11]. Elle n’en demeure pas moins assez audacieuse, ne serait-ce que par sa transposition du droit civil au droit administratif. A cet égard, ce sont les conclusions de la rapporteure qui expliquent la faisabilité du passage d’une branche du droit à l’autre en reconnaissant le préjudice écologique non pas comme un régime de responsabilité dont la transposition serait discutable mais comme une catégorie de préjudice qui voyage donc plus aisément[12]. L’application du schéma du préjudice écologique au réchauffement climatique reste néanmoins source de réflexion notamment du fait de la nature du phénomène qu’elle entend juridiciser.

Un peu de technique juridique Le principe du préjudice écologique est assez simple. Il s’agit d’une responsabilité qui propose de sanctionner le pollueur ou celui qui porte atteinte à l’écosystème[13]. Depuis l’affaire de l’Erika[14] qui posa les jalons sur lesquels s’est bâti le préjudice, son utilisation s’accroît ainsi que la compréhension de son système. Ainsi, comme toute responsabilité, le préjudice écologique repose sur un fait générateur qui cause un dommage apprécié objectivement par l’impact sur des écosystèmes. Le but est de permettre la réparation d’un préjudice distinct de celui des victimes jusque-là identifiables, que ce soit par leur préjudice patrimonial ou moral[15]. Une spécificité toutefois réside dans la réparation du préjudice dont le texte prévoit qu’elle doit se faire en priorité par nature[16]. Il faut comprendre par-là que le préjudice écologique permet d’imputer au pollueur la charge de la dépollution du site atteint, charge qui reposait auparavant sur des personnes physiques ou morales dévouées à la protection de l’environnement mais qui pouvaient être privées de la réparation du préjudice lié au coût de la dépollution si elles étaient déjà victimes de préjudices personnels, ce qui était très souvent le cas. Le schéma de responsabilité est donc aisément lisible : une personne physique ou morale (responsable) qui a pollué (fait générateur) et causé directement et certainement (lien de causalité à prouver) une atteinte à l’écosystème (dommage) doit en assurer la dépollution (réparation en nature) ou si celle-ci est impossible compenser financièrement les personnes morales chargées de la défense de l’intérêt lésé (réparation en dommages et intérêts).

C’est ici que se révèle toute la subtilité de l’application du préjudice écologique au réchauffement climatique. En effet, la logique voudrait que l’Etat soit poursuivi pour la cause du phénomène. Or, après avoir magistralement reconnu sa réalité, les juges en identifient sans ambiguïté l’origine : l’émission de gaz à effet de serre[17]. Dès lors, en suivant le principe du préjudice écologique, l’Etat pourrait tout à fait être reconnu responsable de sa production de gaz à effet de serre et condamné à réparer le dommage qu’elle cause, au moins au titre des activités qui dépendent de lui. Ce n’est toutefois pas le sens du jugement, en raison d’abord de la demande des requérantes. En effet, les associations n’engagent pas la responsabilité de l’Etat en tant que pollueur, mais en tant que puissance normative. Autrement dit, elles reconnaissent implicitement ce que les juges consacrent tout aussi discrètement, à savoir que si l’Etat est bien émetteur de gaz à effet de serre, il ne saurait être inquiété sur ce chef. La justification paraît toute pragmatique tant il est complexe d’imaginer, pour l’instant du moins, un Etat qui fonctionne sans émettre de gaz à effet de serre. Une raison peut également être suggérée au niveau de la réparation, qui voudrait selon la logique du préjudice écologique que les gaz à effet de serre soient nettoyés de l’atmosphère, ce qui est à l’heure actuelle hors de portée de l’action humaine. Enfin, il est possible de trouver dans la neutralité carbone la confirmation de l’idée selon laquelle produire des gaz à effet de serre n’est pas en soi source de responsabilité, tant que cette production est suffisamment compensée par la capacité de l’environnement à les absorber. Reste en tout cas que la responsabilité de l’Etat n’est pas engagée au titre des gaz qu’il contribue à émettre.

Si l’Etat est poursuivi, c’est en tant que puissance normative capable de contraindre avec la force de la loi à la diminution de l’émission de gaz à effet de serre[18]. Car en effet, pour ce qui est du réchauffement climatique, l’enjeu est à la réduction de sa cause, elle-même déterminée par des objectifs fixés dans la loi en tant que budgets-carbone. C’est pourquoi le jugement parle de « l’aggravation » du préjudice écologique qu’est le réchauffement climatique[19]. Tout en reconnaissant que la responsabilité était constituée, les juges déplacent la réflexion sur la question de la réparation. Pour bien le comprendre, il faut reprendre le raisonnement du tribunal, éclairé par les conclusions de la rapporteure.

Genèse climatique Tout part de 1990, qui devient l’année charnière à partir de laquelle est reconnu le réchauffement climatique. Requérantes comme juges reprennent les étapes datées de la progressive prise en compte du phénomène jusqu’à l’engagement de l’Etat dans une série de mesures, symboliques et contraignantes, pour lutter contre lui[20]. De plus, la nature du réchauffement climatique oblige les juges à manipuler savamment la technique du préjudice écologique. Sa cause, les gaz à effet de serre, a une durée de vie incroyablement longue[21] qui en fait une menace anthropique, c’est-à-dire qu’elle se cumule avec le temps. Cet élément est pris en compte par le tribunal qui ne manque pas de souligner que la responsabilité en jeu se mesure à l’aune du siècle et des générations futures[22]. Les gaz existants vont continuer à causer des dommages à l’environnement tout au long de leur durée de vie, soit également bien après que les juges aient rendu leur décision. Il y a donc ici un potentiel de responsabilité assez vertigineux face à un préjudice qui ne fait que croître avec les années. Toutefois, l’appréhension du réchauffement climatique est astucieusement circonscrite.

Vous reprendrez bien un peu de préjudice ? La consultation des conclusions de la rapporteure éclaire quant à l’identification du préjudice pour lequel l’Etat est poursuivi, et conforte sans aucun doute la solution des juges. En distinguant la période avant et après l’établissement des budgets-carbones, la rapporteure propose un éclairage qui respecte l’esprit du préjudice écologique[23]. Ainsi, sur la période pendant laquelle l’Etat polluait sans contrôle, le préjudice écologique est constitué. Cependant, la promulgation des lois sur les seuils de gaz à effet de serre peut apparaître comme une réparation de ce préjudice[24]. En édictant des normes visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, avec comme objectif la neutralité carbone, l’Etat répare le préjudice qu’il a causé en ne réglementant pas l’émission des gaz à effet de serre sur son territoire. Evidemment, cette réparation peut apparaître bien dérisoire, mais elle est en vérité empreinte de pragmatisme. En effet, la production de gaz à effet de serre n’est pas en soi source immédiate du phénomène qu’est le réchauffement climatique. C’est le dépassement de la capacité de l’environnement à réguler ces gaz, et donc leur prolifération anthropique, qui cause un dommage. En focalisant l’attention sur la réparation d’un préjudice déjà constitué, la rapporteure comme les juges ne créent pas une présomption de préjudice pour chaque activité productrice de gaz à effet de serre, sans quoi la société toute entière devrait se mettre à l’arrêt. Cela justifie que le raisonnement porte sur l’étape de la réparation du préjudice qui est aggravé lorsque celle-ci n’est pas efficace.

Reste à savoir, pour ce qui est du réchauffement climatique, si le manquement à sa réparation ne fait qu’aggraver un préjudice déjà existant ou constitue un dédoublement du préjudice. En effet, le meilleur moyen de lutte identifié contre le réchauffement est la diminution des gaz à effet de serre. Cette réduction ne pouvant être accomplie en une nuit, la loi l’échelonne dans le temps avec l’échéance finale de 2050[25]. Entre temps, elle prévoit des budgets-carbone qui fixent les seuils de diminution à respecter. Ainsi, en respectant la loi, l’émission de gaz à effet de serre devrait peu à peu descendre sous le niveau capable de limiter les effets du réchauffement climatique. Cependant, lorsque les seuils ne sont pas respectés, cela signifie que plus de gaz ont été émis que prévu, et ces derniers s’installent dans l’atmosphère. En suivant la distinction opérée par la rapporteure entre les périodes avant et après l’édiction de normes légales, ces gaz émis en trop pourraient être vus comme source d’un préjudice nouveau, constitué pendant la réparation du préjudice initial donc après l’entrée en vigueur des objectifs contraignants. Avec cette idée, le préjudice initial serait toujours réparé par la trajectoire de réduction des gaz à effet de serre, mais chaque manquement à celle-ci ferait naître un nouveau préjudice écologique. Pour les juges la réponse est claire : le surplus de gaz s’ajoute à la source du préjudice qui se trouve donc aggravé. Ce cas de responsabilité, absent du texte[26], se justifie par la temporalité particulière du réchauffement climatique. Même en cours de réparation, le réchauffement climatique peut être aggravé de sorte à engager la responsabilité.

Dommage réparé à moitié pardonné Dans l’application du préjudice écologique, le jugement offre en vérité un contentieux de la réparation en examinant les moyens par lesquels l’Etat entend lutter contre le réchauffement climatique, eux-mêmes liés aux objectifs à atteindre de réduction des gaz à effet de serre. C’est d’ailleurs bien à l’encontre de ces moyens que les associations requérantes s’érigent. Elles entendent à la fois critiquer leur insuffisance et le manquement de l’Etat dans le respect des objectifs[27]. L’idée selon laquelle l’Etat peut être poursuivi pour avoir manqué à des seuils fixés par la loi n’est pas nouvelle[28]. Elle s’est récemment illustrée dans le contentieux proche de la pollution atmosphérique[29]. Bien que l’espèce portât sur la transposition d’une directive, elle demeure éclairante sur les possibilités ouvertes au juge administratif lorsqu’il est saisi de l’Affaire du siècle. Il faut à ce stade relever que, si c’est bien l’Etat qui est poursuivi, l’obligation à laquelle se réfèrent les requérantes ne se limite pas à l’activité de la seule Administration française. Bien au contraire, les budgets-carbones fixés par la loi sont d’application nationale dans des secteurs identifiés. Il s’agit donc pour l’Etat de mettre en oeuvre une politique gouvernementale d’incitation ou de contrainte à la diminution de la production des gaz à effet de serre. Il ne faut néanmoins pas y voir une tentative de faire assumer à l’Etat la responsabilité qu’il partage avec tous les émetteurs de gaz à effet de serre dépendant de sa juridiction.

Ainsi, le véritable préjudice écologique incarné par la production de gaz à effet de serre n’est pas l’objet de l’action en responsabilité. Les juges l’ont bien compris et c’est pourquoi ils parlent « d’aggravation » de ce préjudice. Cela tient de plus à la nature particulière du dommage écologique en cause, sur laquelle la décision prend le temps de s’étendre[30]. Si les juges écartent l’examen de la pertinence des objectifs[31], ils reconnaissent leur dépassement pour la période 2015-2018 comme fautif, conformément à la proposition de la rapporteure[32]. Se pose alors la question de savoir à qui imputer cette faute. Pour les requérantes il ne fait aucun doute que c’est à l’Etat.

B. L’Etat et sa part de responsabilité

C’est pas moi c’est lui Dans la plus pure logique du préjudice écologique et du droit de la responsabilité appliqués au réchauffement climatique, l’Etat ne peut être responsable que des gaz à effet de serre qu’il produit par les activités qui dépendent de lui. Au niveau du réchauffement climatique en lui-même, il est indéniable que si la cause identifiée en est la production de gaz à effet de serre, celle-ci dépend d’une pluralité d’acteurs particulièrement grande, allant des Etats jusqu’aux individus en passant par les entreprises[33]. Chacun assume une part plus ou moins conséquente dans le réchauffement climatique en fonction de sa propre émission de gaz. Dès lors, l’Etat ne saurait être poursuivi solidairement d’une responsabilité qu’il partage avec autant d’acteurs différents.

Dit plus simplement, le réchauffement climatique étant la conséquence d’un surplus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère par rapport à la capacité de l’environnement à les absorber, il est impossible de considérer que ce surplus soit de la seule faute de l’Etat pour laquelle il pourrait être poursuivi. Vu autrement, il est même impossible d’affirmer que l’Etat pourrait être poursuivi des conséquences sur son territoire, tant il est vrai que les gaz à effet de serre ne sont pas des nationaux chauvins mais plutôt des citoyens du monde. C’est un peu le principe du globe qui veut que la circulation dans l’atmosphère des gaz conduit à ce que les émissions françaises, qui ne se distinguent pas des autres, peuvent très bien produire leurs effets en Uruguay tandis que sur le territoire français ce sont les émissions de Chine qui sévissent. Le réchauffement climatique est un phénomène mondial dont il est impossible d’extirper un lien de causalité localisé et certain imputable à une personne juridique isolée, ce qui fait échec au préjudice écologique.

Tous coupables, tous responsables L’Affaire du Siècle pourtant prétend saisir la responsabilité de l’Etat, non pas sur ses émissions de gaz à effet de serre mais au moins vis-à-vis de l’efficacité des mesures qu’il prend pour lutter contre le réchauffement climatique. A l’appui du recours, les requérantes invoquent une obligation générale de lutte qui viendrait justifier un peu plus la responsabilité de l’Etat[34]. Cette obligation pourtant n’a rien avoir avec le préjudice écologique, en tout cas dans ses conditions d’application[35]. Là où peut être discutée une obligation dans cette responsabilité, c’est au niveau de la charge pesant sur le débiteur de la réparation du dommage. Puisque les juges reconnaissent le réchauffement climatique en tant que préjudice écologique et ne désavouent pas expressément la proposition de la rapporteure qu’il soit réparé en nature par les mesures législatives de l’Etat, se pose la question de savoir quelle obligation accompagne cette réparation. Ainsi, les juges auraient à déterminer si, dans le cas précis de la réparation du dommage écologique, l’Etat, ou tout autre responsable, est tenu d’une obligation de moyen ou de résultat. L’esprit du préjudice écologique tend à privilégier l’hypothèse de l’obligation de résultat, un pollueur ou le responsable d’une atteinte à un écosystème doit effectivement réparer le dommage qu’il a causé et ne pas se contenter de dire qu’il a essayé mais n’y est pas parvenu. Cette impression est renforcée par la subsidiarité de la réparation en dommages-intérêts qui vient justement compenser une situation où le dommage ne peut être réparé en nature.

Encore une fois, c’est la nature du réchauffement climatique qui remet en cause la réflexion. Juges, requérantes et rapporteure acceptent sans contradiction que le meilleur moyen, peut-être le seul, de lutte contre le réchauffement climatique, donc le moyen par lequel s’accomplit la réparation du préjudice, est la réduction des gaz à effet de serre[36]. Il s’agit donc d’un dommage tout particulier dont la réparation en nature ne peut pas constituer en la suppression pure et simple mais plutôt en la diminution de sa cause. Cet effort de réalisme n’est pas compatible avec l’idée d’une obligation générale de lutte. Pareille contrainte porte d’autant plus dans sa formulation une étendue indéterminée qui laisse croire à une application sans limites dans tous les domaines d’activités. Pour les requérantes c’est un argument opportun qui leur permet d’attaquer la responsabilité de l’Etat non pas sur les seules émissions de gaz à effet de serre mais sur d’autres secteurs d’actions identifiés[37]. Les juges cependant ne retiennent pas la vision large du champ de responsabilité et resserrent leur décision uniquement sur les gaz à effet de serre, cause certaine du dommage incarné par le réchauffement climatique. Il ne saurait donc y avoir d’obligation générale. Avant toutefois de restreindre la portée de l’obligation qui pèse sur l’Etat, les juges ont reconnu la responsabilité qui lui incombait au titre du préjudice écologique, réalisant l’exploit de créer un lien de causalité grâce à deux motifs inédits.

Pourtant en droit administratif, ainsi que le rappelle la rapporteure, c’est la causalité adéquate qui prévaut[38]. L’Etat n’est responsable que des fautes ou carences qui causent le dommage de façon « privilégié »[39]. Dans une situation avec une pluralité de responsables, comme pour le réchauffement climatique, l’Etat ne peut être inquiété tant que son comportement n’a pas une incidence décisive sur le dommage. La solution semble donc inévitable tant l’action seule de l’Etat, que ce soit sa propre émission de gaz ou celle accomplie sur tout son territoire, n’est pas la cause adéquate du réchauffement climatique. Le phénomène ne disparaîtrait pas avec la fin des émissions françaises de gaz à effet de serre. Néanmoins, de cette façon l’Etat n’échapperait à sa responsabilité que grâce à la pluralité des autres responsables. Ce qui signifie donc que cette responsabilité existe, elle n’est que dissoute.

Chacun pour soi et tous pour le réchauffement climatique Le premier motif qui permet au juge de la retenir, en suivant la suggestion de la rapporteure[40], vient d’une décision néerlandaise[41]. Les juges étrangers avaient consacré la responsabilité de leur Etat en se fondant sur l’idée que pour lutter contre le réchauffement, chacun devait assumer sa part, y compris les puissances souveraines[42]. Cette notion de part de responsabilité permet au tribunal de condamner l’Etat à la fois pour sa propre émission de gaz à effet de serre et pour le manquement aux objectifs de réduction qu’il avait fixé. Bien sûr, le dépassement des seuils n’est pas du seul fait de l’Etat, il s’apprécie au niveau national. Cependant, les juges affirment que si les objectifs n’ont pas été atteint c’est parce que l’Etat a manqué à utiliser son pouvoir normatif de contrainte sur son territoire[43]. Ainsi, l’Etat est responsable pour ne pas avoir pris des mesures obligeant au respect des engagement légaux et donc empêchant le surplus d’émissions.

C’est le sens du deuxième motif des juges qui retiennent que par la multiplication de textes nationaux et internationaux contenant des objectifs de réduction contraignants, allant jusqu’à les projeter dans des trajectoires annualisées, l’Etat a déjà reconnu sa responsabilité dans la lutte contre le réchauffement climatique[44]. C’est d’ailleurs ce que soutenaient les experts et les associations requérantes. En reconnaissant le réchauffement climatique et en agissant pour lutter contre lui, l’Etat a accepté la responsabilité qui lui était échue dans sa réalisation. Suivant la recommandation de la rapporteure[45], les juges considèrent que cette responsabilité est constituée, à proportion toutefois de la part imputable à la France. Cette part s’apprécie en fonction des émissions de gaz à effet de serre sur son territoire, des seuils fixés pour leur réduction, et des mesures prises pour garantir le respect de ces seuils.

Il est d’ailleurs intéressant de relever que dans le jugement, la question du lien de causalité est étudiée avec l’appréciation de l’obligation de lutte contre le réchauffement climatique[46]. La décision ne saurait être plus claire : l’Etat est responsable devant les lois qu’il prend pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Son obligation tient à faire respecter les objectifs qu’il fixe en prenant toute mesure appropriée. Evidemment, la lecture à rebours du jugement suggère que si l’Etat n’avait promulgué aucune loi sur la diminution des gaz à effet de serre, il aurait manqué l’un des fondements à sa responsabilité. Ainsi, les associations requérantes ont bénéficié de la prise de conscience politique sans laquelle leur recours n’aurait pas abouti. Il s’agit néanmoins d’une réflexion qui ne se vérifierait que chez d’autres Etats moins engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Pour ce qui est de la France la solution est désormais connue. L’Etat doit assumer sa part de responsabilité dans l’existence du réchauffement climatique et il le fait en produisant une législation sur la réduction des causes du phénomène qu’il doit s’assurer de faire respecter. En laissant les émissions de gaz à effet de serre dépasser les objectifs de diminution, l’Etat est en carence, il manque à prendre des mesures contraignantes, et aggrave donc le préjudice. Sa responsabilité maintenant consacrée, il reste aux juges à déterminer les modalités de sa réparation.

Vous pouvez citer cet article comme suit :
Journal du Droit Administratif (JDA), 2021 ;
Chronique administrative ; Art. 359.


[1] Marie-Adélaïde Scigacz, « Météo : on vous explique comment un “dôme de chaleur” met l’ouest du Canada et des Etats-Unis en surchauffe », Franceinfo, 29 juin 2021, https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/meteo-on-vous-explique-comment-un-dome-de-chaleur-a-mis-l-ouest-du-canada-et-des-etats-unis-en-surchauffe_4681753.html.

[2] Pour une introduction à ces procès climatiques Christel Cournil, « « L’affaire du siècle » devant le juge administratif », AJDA, 8, 4 février 2019, p. 437 ; Christel Cournil et Marine Fleury, « De « l’Affaire du siècle » au « casse du siècle » ? : Quand le climat pénètre avec fracas le droit de la responsabilité administrative », Revue des droits de l’homme, 7 février 2021, http://journals.openedition.org/revdh/11141.

[3] Loi Climat et Résilience n°2021-1104 du 22 août 2021

[4] Conseil constitutionnel, Union des industries de la protection des plantes, QPC du 31 janvier 2020, n° 2019-823

[5] Tribunal des conflits, Blanco, 8 février 1873, n°00012

[6] Arnaud Cabanes, « L’affaire du siècle donnera-t-elle lieu au jugement du siècle ? », EEI, 11, novembre 2018, p. 15.

[7] Hakim Gali, « Le préjudice et l’environnement », Recueil Dalloz, 13, 15 avril 2021, p. 709 ; Rémi Radiguet, « Responsabilité de l’Etat – Climat », Revue juridique de l’environnement, 46-2021/2, 2 juillet 2021.

[8] Ainsi qu’il finit par les appeler p.30

[9] Protégeant le droit à la vie

[10] Ce que les juges néerlandais ont pris le parti de faire dans leurs décisions Urgenda en première instance, appel et cassation

[11] Article 1247 du code civil « Est réparable, dans les conditions prévues au présent titre, le préjudice écologique consistant en une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices collectifs tirés par l’homme de l’environnement. »

[12] Amélie Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France, 2021. p.11 « Le législateur ne semble pas avoir voulu créer un régime de responsabilité objective en dépit de la formulation, qui permet l’hésitation, mais plutôt une obligation de réparation d’un type de préjudice dans le cadre des régimes de responsabilité existants »

[13] Agathe Van Lang, « Affaire de l’Erika : la consécration du préjudice écologique par le juge judiciaire », AJDA, 17, 5 mai 2008, p. 934.

[14] Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 septembre 2012, n° 10-82.938

[15] Mathilde Boutonnet, « Une reconnaissance du préjudice environnemental pour une réparation symbolique… », Environnement, 7, 7 juillet 2009, p. 90.

[16] Article 1249 du code civil « La réparation du préjudice écologique s’effectue par priorité en nature. »

[17] Voir le jugement p.28 point 16

[18] A. Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France…, op. cit. p.19 « Mais l’Etat a un pouvoir particulier, proprement essentiel, d’orientation des comportements par son pouvoir de réglementation et l’ensemble des moyens de la puissance publique dont il dispose pour en assurer le respect. » plus loin « si les comportements personnels sont bien évidemment la cause d’émissions de gaz à effet de serre, la modification structurelle de nos mode de vie est nécessaire pour arriver à une réduction durable des émissions de gaz à effet de serre, ce qui ne peut se faire sans l’Etat. »

[19] Jugement p.30 « l’amélioration de l’efficacité énergétique n’est qu’une des politiques sectorielles mobilisables en ce domaine, ne peut être regardé comme ayant contribué directement à l’aggravation du préjudice écologique dont les associations requérantes demandent réparation »

[20] Voir le jugement p.24 et 25 et 28 à 30

[21] Jugement p.6 « les gaz à effet de serre anthropiques ont une durée de vie de 12 à 120 ans dans l’atmosphère, ce qui implique que l’arrêt immédiat des émissions n’empêcherait pas la température globale d’augmenter pendant encore plusieurs décennies. »

[22] Jugement p.34 « des émissions supplémentaires de gaz à effet de serre, qui se cumuleront avec les précédentes et produiront des effets pendant toute la durée de vie de ces gaz dans l’atmosphère, soit environ 100 ans, aggravant ainsi le préjudice écologique invoqué »

[23] A. Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France…, op. cit. p.17 « Si l’on peut raisonnablement penser qu’il existe une obligation pour l’Etat de lutter contre un phénomène, sur lequel il reconnaît lui-même avoir en partie prise, dont les conséquences imbriquées et cumulées mettent en péril rien moins que le développement durable des sociétés humaines, les gaz à effet de serre non réglementés émis à partir du territoire français avant que la trajectoire carbone ne soit adoptée nous semblent avoir ensuite été pris en compte par cette trajectoire censée nous conduire à la neutralité carbone en 2050. »

[24] Ibid. p.17 « Il nous semble qu’il n’existe plus de préjudice écologique à réparer résultant de la carence à adopter une réglementation d’atténuation des effets du réchauffement climatique dès lors que la mesure de l’aggravation de ce préjudice est prise en compte dans l’actuelle trajectoire. »

[25] Jugement p.34 « il résulte de l’instruction que la France, ainsi qu’il a été dit, s’est engagée, aux termes de l’article L.100-4 du code de l’énergie, à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40% entre 1990 et 2030 et à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six entre 1990 et 2050 »

[26] L’article n’envisage pas le cas où le préjudice écologique pourrait empirer après ou pendant sa réparation

[27] Jugement p.3 à 6

[28] Agathe Van Lang, « Protection de la qualité de l’air : de la transformation d’un droit gazeux en droit solide », RFDA, 6, 11 janvier 2018, p. 1135.

[29] Conseil d’Etat, 12 juillet 2017, Association Les Amis de la Terre France n°394254

[30] Voir le jugement p.28 point 16

[31] Jugement p.34 « Par conséquent, à supposer même que les engagements pris par l’ensemble des Etats parties seraient insuffisants, les associations requérantes n’établissent pas que ces derniers seraient, par leur insuffisance, directement à l’origine du préjudice écologique invoqué. »

[32] A. Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France…, op. cit. p.15 « la méconnaissance du 1er budget carbone […] nous semble caractériser une faute de l’Etat qui ne respecte pas la trajectoire qu’il a élaboré pour atteindre l’objectif final de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% en 2030 »

[33] Ibid. p.19 « Si l’action de l’Etat entraîne des émissions de gaz à effet de serre, nous sommes tous des émetteurs de gaz à effet de serre, personne physique, morale, privée ou publique : ces émissions correspondent aux différentes facettes de nos modes de vie, de production, de consommation. »

[34] Jugement p.2 « L’Etat est soumis à une obligation générale de lutter contre le changement climatique, qui trouve son fondement, d’une part, dans la garantie du droit de chacun à vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, reconnu par l’article 1er de la Charte de l’environnement, à valeur constitutionnelle, d’autre part dans l’obligation de vigilance environnementale qui s’impose à lui en vertu des articles 1er et 2 de la même Charte »

[35] Outre l’article 1247, l’article 1248 précise les titulaires de l’action en réparation du préjudice écologique et l’article 1249 encadre cette réparation, aucun n’impliquant une obligation spécifique contre l’Etat

[36] Même si les requérantes tentent de faire reconnaître d’autres domaines d’action énumérés p.3 du jugement, notamment l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, le transport, le bâtiment ou l’agriculture

[37] Jugement p.3 « L’Etat est également soumis à des obligations spécifiques en matière de lutte contre le changement climatique, fixées par les conventions internationales, le droit de l’Union européenne et le droit interne, et qui portent respectivement sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la réduction de la consommation énergétique, le développement des énergies renouvelables, l’adoption de mesures sectorielles et la mise en oeuvre de mesures d’évaluation et de suivi »

[38] A. Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France…, op. cit. p.18 « Pour engager la responsabilité d’une personne publique, vous recherchez si sa faute constitue la cause adéquate du dommage et pas seulement l’une des conditions nécessaires à sa réalisation – causalité adéquate versus équivalence des conditions – … »

[39] Ibid. p.18

[40] Ibid. p.20

[41] Véritable saga judiciaire qui débuta avec la décision Tribunal de District de La Haye, 24 juin 2015, aff. C/09/456689/HA ZA 13-1396 pour s’achever avec la décision Cour Suprême des Pays-Bas, 20 décembre 2019, Etat des Pays-Bas c. Fondation Urgenda, n°19/00135

[42] A. Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France…, op. cit. p.20 « Mais il nous semble, comme l’a relevé la cour suprême des Pays-Bas dans l’arrêt Urgenda […], chaque pays est responsable de réduire ses émissions de gaz à effet de serre à proportion de sa part de responsabilité. »

[43] Jugement p.35 « Il résulte de tout ce qui précède que les associations requérantes sont fondées à soutenir qu’à hauteur des engagements qu’il avait pris et qu’il n’a pas respectés dans le cadre du premier budget carbone, l’Etat doit être regardé comme responsable, au sens des dispositions précitées de l’article 1246 du code civil, d’une partie du préjudice écologique constaté au point 16. »

[44] Jugement p.30 point 21

[45] A. Fort-Besnard, Conclusions de Mme la rapporteure publique dans le jugement Associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous, Greenpeace France et Fondation pour la Nature et l’Homme contre France…, op. cit. p.21 « Sa responsabilité nous semble devoir être engagée… à la hauteur de ses engagements ; le préjudice en résultant nous semble devoir être réparée dans cette mesure. »

[46] Le jugement est découpé en titres dont le premier est « en ce qui concerne les carences fautives et le lien de causalité » suivi immédiatement après par « s’agissant de l’obligation générale de lutte contre le changement climatique »

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