Bernard Stirn
Président de section au Conseil d’Etat,
professeur associé à Sciences Po Paris
Art. 151.
1 – Quelle est, selon vous, la définition du droit administratif ?
Le droit administratif trace le cadre de l’action administrative et détermine l’organisation des relations entre les citoyens et les autorités publiques.
2 – Selon vous, existe-t-il un « droit administratif d’hier » et un « droit administratif de demain », et dans l’affirmative, comment les distinguer / les définir ?
Le droit administratif est vivant par nature. Il épouse les modifications du rôle et des moyens d’action de la puissance publique et s’adapte en fonction des attentes sans cesse renouvelées des citoyens. Il n’est ni d’hier ni de demain mais en évolution constante.
3 – Qu’est ce qui fait, selon vous, la singularité du droit administratif français ?
S’il a une singularité, ce qui est moins sûr qu’on le croit souvent, le droit administratif français la tient du rapport particulièrement fort du pays avec l’Etat qui l’a construit et dont les citoyens continuent d’attendre beaucoup.
4 – Quelle notion (juridique) en serait le principal moteur (pour ne pas dire le critère) ?
L’intérêt général.
5 – Comment le droit administratif peut-il être mis « à la portée de tout le monde » ?
La présentation dès l’école des institutions publiques, nationales et locales, et de l’organisation des juridictions seraient la première pierre d’un meilleur accès de tous au droit administratif.
6 – Le droit administratif est-il condamné à être « globalisé » ?
Il ne s’agit pas d’une condamnation mais d’un contexte. Le droit s’inscrit de plus en plus au-delà des frontières, singulièrement en Europe. Droit national, droit européen et droit international s’interpénètrent de plus en plus. Le droit comparé est une nécessité. En Europe, un droit public européen se construit. Le droit administratif français, qui est un élément important de cet ensemble, y trouve de nouveaux horizons.
7 – Le droit administratif français est–il encore si « prétorien » ?
Même si les textes sont plus nombreux et parfois exagérément proliférant, la vivacité et la créativité jurisprudentielle demeurent la marque du droit administratif français. Elles ont été très fortes ces dernières années. En particulier, la jurisprudence a reconfiguré la hiérarchie des normes, tracé un cadre renouvelé au droit public économique et au droit de la régulation, revu le régime des contrats publics, repris en main les règles de procédure et la définition des pouvoirs du juge, joué un rôle décisif dans la protection des droits fondamentaux et même déterminé la manière d’appréhender de grands problèmes de société, en matière notamment de laïcité et de bioéthique.
8 – Qui sont (jusqu’à trois propositions) selon vous, les « pères » les plus importants du droit administratif ?
- Edouard Laferrière
- Georges Vedel
- Marceau Long
9 – Quelles sont (jusqu’à trois propositions) selon vous, les décisions juridictionnelles les plus importantes du droit administratif ?
- TC, 8 février 1873, Blanco
- CE, 19 mai 1933, Benjamin
- Ce, 20 octobre 1989, Nicolo.
10 – Quelles sont (jusqu’à trois propositions) selon vous les normes (hors jurisprudence) les plus importantes du droit administratif ?
- La constitution de l’an VIII ;
- la loi du 24 mai 1872 ;
- le code de justice administrative.
11 – Si le droit administratif était un animal, quel serait-il ?
Un lion
12 – Si le droit administratif était un livre, quel serait-il ?
Les Mémoires D’Hadrien, de Marguerite Yourcenar.
13 – Si le droit administratif était une œuvre d’art, quelle serait-elle ?
La liberté guidant le peuple, de Delacroix.
Vous pouvez citer cet article comme suit :
Journal du Droit Administratif (JDA), 2017, Dossier 04 : «50 nuances de Droit Administratif» (dir. Touzeil-Divina) ; Art. 151.
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