Responsabilité de l’Etat & dispositifs médicaux

ParJDA

Responsabilité de l’Etat & dispositifs médicaux

Art. 327.

Le présent article, rédigé par Mme Isabelle Poirot-Mazères, professeur de droit public à l’Université Toulouse I Capitole, Co-directeur du Master Droit de la Santé, s’inscrit dans le cadre de la 2e chronique en Droit de la santé du Master avec le soutien du Journal du Droit Administratif.

par Isabelle POIROT-MAZERES

Prothèses PIP
& responsabilité de l’Etat comme autorité de police sanitaire : du principe et des faits
(Obs. sous CE, 16 nov. 2020, n° 431159 ; 16 nov. 2020, n° 437600)

Les contentieux de santé publique se succèdent en France dans une longue litanie où se mêlent incuries, défaillances et parfois collusions en tous genres qui propulsent au cœur d’une actualité qui semble bégayer, non plus les seuls médicaments mais désormais aussi les dispositifs médicaux. Si la mise en cause de ces produits de santé lors de scandales médiatisés n’est pas inédite, l’affaire des prothèses de la société Poly Implant Prothèses (PIP) est exemplaire à divers égards, sorte de précité chimiquement pur tout à la fois des contextes, des solutions jurisprudentielles et des paradoxes qui caractérisent les contentieux relatifs aux dispositifs médicaux, singulièrement implantables. Paradoxe de victimes censées retrouver souffle, mobilité ou simplement image corporelle, obligées de subir en retour explantation ou nouvelles interventions quand elles ne souffrent pas de pathologies ou d’infirmités induites. S’agissant des deux dossiers traités par le Conseil d’Etat le 16 novembre 2020, l’une et l’autre des requérantes avaient, à la suite de la révélation de l’affaire et sur les recommandations des autorités sanitaires, accepté de subir une explantation de leurs prothèses mammaires PIP. On se souvient qu’en 2010, à la suite d’une inspection de l’ANSM, elle-même motivée par de graves suspicions, il est révélé que la société, alors troisième exportateur mondial de prothèses mammaires, a frauduleusement remplacé dans ses produits le gel de silicone par un « gel maison » non homologué, différent de celui qui avait été déclaré dans le dossier de conception et de fabrication de ces implants, avec des risques plus élevé de rupture et des conséquences médicales délétères liées notamment au caractère inflammatoire du gel utilisé. Le ministère de la santé français a alors recommandé à l’ensemble des femmes concernées (30 000 en France sur 400 000 dans le monde) de faire réopérer pour procéder, à titre préventif, à l’explantation de leurs prothèses,  recommandation qui sera suivie par 18 667 d’entre elles entre 2001 et fin mars 2016, dont 13626 préventivement sans signe d’alerte et 7 708 après avoir subi un évènement indésirable[1].

Pour beaucoup alors, l’injustice est totale : à l’épreuve de la maladie et de la mutilation, surmontée par la reconstruction, succède un long combat judiciaire, aux multiples volets. Car le contexte lui-même complique la quête d’une indemnisation : il ne s’agit pas seulement de mettre en cause un produit défectueux pour obtenir réparation comme lors d’autres contentieux relatifs à des prothèses articulaires[2], testiculaires[3] ou cardiaques[4], mais aussi de poursuivre les responsables identifiés. Or les voies disponibles se sont avérées les unes après les autres décevantes. Les poursuites pénales à l’encontre des responsables directs ont débouché sur une impasse indemnitaire en raison de l’insolvabilité de la société PIP, placée en liquidation judiciaire dès mars 2010, comme de celle de ses dirigeants, définitivement condamnés pour escroquerie et tromperie aggravée[5]

Les victimes n’ont eu alors d’autre choix que de se tourner vers les autres acteurs de l’affaire, sans guère plus de résultats:  la mise en cause de l’assureur de la société PIP, la société Allianz, a tourné court, la garantie plafonnée à 3 millions d’euros limitant de facto le montant des indemnisations accordées à chacune des victimes (environ 460 €) ; celle des chirurgiens eux-mêmes, sur la base d’une responsabilité pour faute, singulièrement pour défaut d’information, à être admise, ne permettait pas davantage de couvrir l’intégralité des préjudices ni de compenser la défaillance du principal coupable[6] .

Dans cette recherche de débiteurs enfin solvables et propres à couvrir, par une condamnation à la mesure de leur implication, l’ensemble des préjudices subis, le comportement des contrôleurs de la société PIP et de ses produits va rapidement être interrogé,  qu’il s’agisse de l’organisme notifié, TÜV Rheinland, ou de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (devenue entretemps l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) en charge du suivi des produits et de la matériovigilance. Dans l’un et l’autre cas, c’est l’abstention fautive qui est dénoncée, faillite du certificateur d’abord, dans sa mission de garantie de la conformité et de surveillance du système qualité, carence de l’Etat ensuite, dans sa mission de contrôle et de police sanitaire relative aux dispositifs médicaux telle que prévue par les textes (directive 93/42/CEE et articles L.5212-1 et s. du code de la santé publique). Comme le rappelle Vincent Villette dans ses conclusions[7], sur le plan politique, cette affaire PIP -et dans une moindre mesure celle des prothèse de hanche ASR[8]– a conforté la conviction largement partagée de la nécessité d’une refonte des textes européens, issus d’une « Nouvelle approche » à l’inspiration libérale dépassée,  préparant les esprits à un renforcement des pouvoirs de contrôle porté par les nouveaux règlements de 2017[9].

L’affaire PIP, dans ses divers développements contentieux -au pénal, au civil et donc devant les juridictions administratives- comme dans ses prolongements politiques, a été l’occasion aussi de mettre en lumière, au mieux les limites d’une procédure « longtemps sous-dimensionnée par rapport aux risques inhérents à certains dispositifs médicaux », au pire les graves dysfonctionnements du contrôle des dispositifs médicaux, de leur mise sur le marché à leur utilisation, dans un « mélange surprenant de complexité et de flexibilité »[10] propice à toutes les dérives.

Par ces deux décisions du 16 novembre 2020, le Conseil d’Etat met un terme à une séquence juridictionnelle entamée avec la condamnation de l’Etat par le tribunal administratif de Montreuil en 2019[11] et marqué depuis par des prises de position différentes des tribunaux administratifs sur les demandes d’indemnisation formulées contre l’Etat pour carence fautive[12].

La Haute juridiction y articule l’affirmation de la responsabilité de principe de l’Etat dans sa mission de police sanitaire sur les dispositifs médicaux -alignant ainsi sans surprise le statut contentieux de la matériovigilance sur celui d’autres vigilances précédemment prises en défaut- (I) avec le rejet circonstancié de cette même responsabilité, au regard d’une chronologie des faits rigoureusement décryptée (II). Ces décisions rejoignent ainsi la lignée des arrêts « prétexte » dont la postérité tient non tant à la solution ponctuellement retenue qu’à la règle posée et au considérant de principe…

I. La reconnaissance de principe de la responsabilité de l’Etat dans l’exercice de son pouvoir de police sur les dispositifs médicaux

C’est au terme d’une analyse serrée des compétences de chacun des acteurs de nature à être mis en cause dans leur mission de contrôle des dispositifs médicaux que le Conseil d’Etat consacre sans surprise le principe d’une responsabilité de l’Etat pour faute simple en la matière.

A. Le rappel de la répartition des rôles entre l’organisme certificateur et l’ANSM

1. Les textes

Le cadre juridique des dispositifs médicaux a été tardivement fixé, à la différence de celui des médicaments objets depuis toujours d’une attention particulière[13]: il était jusqu’à peu constitué de trois textes désormais en cours de remplacement, la directive 90/385/CEE du 20 juin 1990, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux dispositifs médicaux implantables actifs (DMIA), la directive 93/42/CEE du 14 juin 1993, relative aux dispositifs médicaux (DM), enfin, la directive 98/ 79/CE du 27 octobre 1998, relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DMDIV)[14]. Leurs dispositions, notamment celles relatives à la répartition des attributions ante et post commercialisation, ont été transposées en droit interne dans les parties législative et réglementaire du deuxième livre de la cinquième partie du code de la santé publique (C. santé publ., art. L. 5211-1 et R. 5211-1 et s.).

Elles déterminent le rôle respectif des fabricants et des autorités nationales dans le cycle de vie du dispositif médical. La mise sur le marché dépend totalement des premiers qui doivent démontrer la conformité de leur dispositif médical aux exigences essentielles de qualité, de performance et de sécurité énoncées dans les directives afin de pouvoir disposer du marquage CE sur leur produit. Plus précisément, l’entreprise se doit de choisir un organisme notifié qui se charge de certifier que les produits sont conformes et sur la base du certificat délivré par l’organisme notifié, elle peut alors apposer le marquage CE sur ses produits et les vendre librement dans toute l’Union européenne.

De la sorte, tout dispositif médical, préalablement à sa commercialisation, doit avoir été conçu -et avoir été vérifié comme tel-  de façon à ce que son utilisation ne compromette ni l’état clinique des patients, ni la sécurité et la santé des patients et des utilisateurs. La procédure de certification elle-même dépend de la classification du dispositif: hors la classe 1[15], l’apposition du marquage est subordonnée à l’obtention d’un certificat CE délivré par un organisme notifié, habilité par les autorités compétentes. En raison de leur caractère sensible, et par dérogation à l’annexe IX de la directive 93/42/CEE, les implants mammaires, jusqu’alors en classe IIb ont fait l’objet en 2003 d’une reclassification en classe III (directive 2003/32/CE de la Commission du 3 février 2003 concernant la reclassification des implants mammaires), ainsi d’ailleurs que les prothèses totales de hanche, genou, épaule (directive 2005/50/CE). Pour cette classe de dispositifs, l’article 11 de la directive de 1993 offre au fabricant une alternative en prévoyant deux procédures de certification distinctes : la première repose sur l’examen d’un produit type, sur la base d’un échantillon représentatif de la production (dite « examen CE de type » annexe III en liaison avec la procédure relative à la vérification CE visée à l’annexe IV ou avec la procédure relative à la déclaration CE de conformité -assurance de la qualité de la production- visée à l’annexe V) ; la seconde fait porter le contrôle non plus sur le produit lui-même mais sur la documentation relative à sa conception.

C’est cette dernière, dite de « déclaration CE de conformité » (système complet d’assurance de qualité visé à l’annexe II de la directive de 1993, point 4 « Examen de la conception du produit »), qui a été retenue par la société PIP pour la certification de ses prothèses : dans ce cadre, le producteur dépose un dossier, où il explicite les conditions de fabrication, le contrôle qualité et les matériaux de base utilisés, obligations complétées par la réalisation d’un audit du système de qualité. Tout repose ainsi sur l’action du fabricant dès lors qu’il lui incombe de procéder lui-même aux contrôles qualité avant d’en présenter les résultats à l’organisme de certification, qui se contente de les vérifier alors sur papier. L’évaluation ce dernier couvre le process de conception et de production des dispositifs médicaux, l’ensemble du système d’assurance qualité et son application, et intègre, entre autres, un contrôle strict des matières premières utilisées. L’effectivité en reste relative, fortement dépendante de la loyauté des allégations du producteur : le contrôle en effet porte avant tout sur la capacité même de l’entreprise à produire des produits conformes, sans aller jusqu’à en analyser la constitution, un point fortement discuté lors de la mise en cause de TüV Rheinland. Il résulte de ce schéma que « l’organisme notifié ne peut travailler que sur le dossier qui lui est fourni, tant que la documentation est conforme aux exigences de production dudit produit »[16], avec les zones grises et les risques de fraude que cette latitude autorise. Ce positionnement de l’organisme certificateur a été qualifié de « minimaliste » par le rapport parlementaire du 6 mars 2019, qui relève que loin de s’apparenter à un contrôle scientifique, comme en matière d’AMM pour les médicaments, il  se résume à  une « évaluation d’évaluation » ou plus exactement à une « évaluation d’autoévaluation »[17].

2. Des obligations de chacun, interprétées à la lumière des faits

a)

Ce sont en premier lieu les insuffisances et incuries dans le contrôle réalisé par l’organisme notifié TüV Rheinland, qui ont été dénoncées et que les plus hautes juridictions, en dernier lieu la plus haute juridiction allemande (BGH-Bundesgerichthof[18]), après la Cour de cassation, ont condamnées en reconnaissant sa responsabilité singulière de certificateur.

Il lui a en effet été reproché de ne pas avoir procédé à des contrôles inopinés auprès de la société, lesquels auraient permis, en examinant notamment sa politique d’achat de matières premières, de dévoiler les incohérences et la fraude[19]. Pourtant dès l’abord, cette mise en cause ne s’imposait pas à la lecture stricte des textes. D’ailleurs, la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait sur ce point exonéré TüV aux motifs que ses responsables avaient « respecté les obligations leur incombant en qualité d’organismes certificateurs » et « n’avaient pas commis de faute engageant leur responsabilité civile délictuelle »[20]. Plus précisément, alors même qu’ils en avaient la faculté, rien ne les obligeait à procéder à des visites inopinées « ni même d’effectuer des prélèvements sur le produit, ni d’effectuer des tests sur les prothèses commercialisées »[21]. C’est de façon plus radicale que la CJUE, sur renvoi préjudiciel de la Cour fédérale d’Allemagne, s’est prononcée sur la portée des obligations du certificateur, redonnant espoir aux victimes quant à la possibilité de trouver un responsable à même d’assumer leurs demandes de réparation[22]. A la requête de la requérante, la Cour a en effet répondu que si un organisme notifié « n’est pas  tenu  de  manière  générale  d’effectuer des inspections  inopinées,  de  contrôler  les dispositifs  et/ou  d’examiner  les  documents  commerciaux  du  fabricant », il se doit toutefois de prendre, « en présence d’indices suggérant qu’un dispositif médical est susceptible d’être non conforme aux exigences découlant de la directive 93/42 (…) toutes les mesures nécessaires afin de s’acquitter de ses obligations au titre de l’article 16, paragraphe 6, de cette directive, qui lui attribue le pouvoir de suspendre, de retirer ou d’assortir de restrictions le certificat délivré, ainsi qu’au titre des points 3.2, 3.3, 4.1 à 4.3 et 5.1 de l’annexe II de la directive, qui lui imposent d’analyser la demande d’examen du dossier de conception des dispositifs médicaux introduite par le fabricant, de déterminer si l’application du système de qualité du fabricant garantit que ces dispositifs satisfont aux dispositions pertinentes de la directive et de s’assurer, en procédant à la surveillance du fabricant, que celui-ci remplit correctement les obligations qui découlent du système de qualité approuvé ». Tirant les conclusions de ce rappel au texte[23], la Cour de cassation[24] en déduit à la charge du certificateur une obligation particulière de vigilance et la responsabilité:  en présence d’indices de non-conformité comme en l’espèce,  il devait procéder,  non pas à des visites annoncées mais réellement impromptues, propres à déjouer toute manœuvre de  dissimulation,  se livrer aussi « au contrôle des documents du fabricant qui recensent les achats de matières premières » comme au contrôle des dispositifs médicaux eux-mêmes.

b)

C’est en regard des attributions de TüV Rheinland et des responsabilités qui étaient les siennes au titre de son rôle de certificateur qu’il convenait d’apprécier celles de l’AFSSAPS en sa qualité d’autorité nationale en charge du suivi des produits et de la matériovilance, telles que précisées par la directive du 14 février 1993 transposée aux articles L.5212-2 et R. R212-14 et s. du code de la santé publique. Le dispositif est articulé sur certains fondamentaux que le nouveau cadre réglementaire, relèvent les analystes, ne bouleverse pas : « vaste latitude du fabricant, centralité des organismes notifiés, renvoi des exigences sanitaires au suivi des incidents »[25].

Le rôle des autorités sanitaires, résiduel en ce qui concerne la mise sur le marché des dispositifs médicaux, a été concentré dans le système de matériovigilance, auquel contribuent tous les acteurs concernés et que pilote l’ANSM, chargée notamment de réaliser une veille des événements inattendus ou indésirables[26]  et de mettre en œuvre un  programme  de  surveillance.  Ces activités font l’objet depuis décembre 2018 d’une accréditation ISO 9001 pour l’action « Gérer le risque »[27].  Il lui appartient ainsi d’une part, « de mettre en œuvre un dispositif de matériovigilance permettant de recenser et d’évaluer, de façon centralisée, les dysfonctionnements et altérations délétères des caractéristiques ou des performances d’un dispositif comme d’en ordonner le rappel et, d’autre part, de prendre, « au vu des informations ainsi recueillies ou dont elles auraient connaissance par d’autres moyens, toute mesure provisoire nécessaire à la protection de la santé ou de la sécurité des patients  ou d’autres personnes ». Elle reçoit ainsi et traite les signalements d’incidents ou risques d’incident grave,  assure une activité propre de surveillance du marché des dispositifs médicaux par le truchement d’inspections annoncées ou inopinées (inspection sur site des fabricants et analyses en laboratoire), dispose de pouvoirs de police sanitaire au nom de l’Etat lui permettant de restreindre ou suspendre l’utilisation d’un dispositif dangereux ou suspect, et d’enjoindre au fabricant, comme elle l’a finalement fait à l’encontre de PIP, de retirer du marché les produits de nature à menacer la santé humaine (article L. 5312-1 du code de la santé publique).

L’analyse des pouvoirs reconnus à l’Agence en matière de surveillance des dispositifs médicaux postcommercialisation permet au Conseil d’Etat de reprendre ici le raisonnement et les formulations qui avaient été les siens lors de l’appréciation de la réaction de l’AFSSAPS dans l’affaire du Médiator au sujet de la pharmacovigilance et telles qu’elles avaient été dégagées il y a presque trente ans s’agissant de l’hémovigilance.

B. La confirmation attendue d’une responsabilité pour faute simple

1. Un principe de solution devenu classique

Déjà retenu par les tribunaux administratifs par transposition d’une jurisprudence désormais bien établie autour des activités de contrôle et de police administrative, le principe d’une responsabilité pour faute simple a été sans surprise consacré par le Conseil d’Etat, au terme d’un raisonnement aux éléments et aux considérants clefs devenus classiques. On y retrouve les nuances argumentatives autour de la qualification juridique des comportements de carence et d’inaction de l’administration, toujours difficiles à appréhender. L’évolution jurisprudentielle est connue qui a vu les solutions adoptées en matière de police administrative[28] investir le domaine de la santé publique, plus précisément les missions de contrôle et de police sanitaire,  pour des raisons politiques similaires et par  une argumentation réitérée. Le juge retient la faute simple au regard de l’importance des intérêts en cause (la santé publique) et des pouvoirs dont disposait le contrôleur, propres à lui assurer une réelle emprise sur le contrôlé et à lui permettre d’éviter les dérives. Initié dans l’affaire du sang contaminé à propos du contrôle de la transfusion sanguine[29], le raisonnement a été transposé dans l’affaire du Médiator au sujet de la police sanitaire relative aux médicaments[30] et repris lors des procès mettant en cause les dommages causés par la Dépakine[31].  

La question de la responsabilité de l’Etat, au travers de l’AFSSAPS puis de l’ANSM, se focalise sur les pouvoirs postcommercialisation dont il disposait et sur les marges d’appréciation qui étaient effectivement les siennes au moment des faits. A cet égard, rappelons que si les attributions de l’autorité sanitaire sont réelles en matière d’autorisations de mise sur le marché, elles sont en revanche limitées s’agissant de la mise sur le marché des dispositifs médicaux, qui ne font pas l’objet, contrairement aux médicaments, d’une évaluation préalable par l’agence de leur bénéfice-risque. Comme vu précédemment, les textes ont en retour conforté les pouvoirs de vigilance des autorités nationales.

2. Une transposition prévisible

Dotée de pouvoirs appréciables, l’ANSM se doit aussi d’en répondre. Ainsi, comme il l’a fait à propos du médicament, le juge confronté à une défaillance supposée lors des contrôles après commercialisation des prothèses PIP, se livre à une analyse textuelle serrée des attributions de l’Agence  -de la directive concernée aux articles du code de la santé publique qui en réalisent la transposition-, pour en déduire un principe de  la responsabilité pour faute simple, à la mesure des pouvoirs reconnus à l’autorité sanitaire et des intérêts visés, à savoir la santé et la sécurité des patients : « eu égard tant à la nature des pouvoirs conférés par les dispositions précitées à l’AFSSAPS, agissant au nom de l’Etat, en matière de police sanitaire relative aux dispositifs médicaux, qu’aux buts en vue desquels ces pouvoirs lui ont été attribués, la responsabilité de l’Etat peut être engagée par toute faute commise dans l’exercice de ces attributions, pour autant qu’il en soit résulté un préjudice direct et certain ». Le Conseil d’Etat d’ailleurs rejette explicitement l’argument opposé la requérante selon lequel le tribunal administratif de Marseille aurait par erreur de droit « subordonné la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat à la caractérisation d’une faute d’une certaine gravité »[32]. Rappelons aussi que les fautes imputables à la société PIP ne pouvaient, pas plus que dans l’affaire du Médiator du fait des manœuvres dolosives des laboratoires Servier, exonérer la puissance publique de sa responsabilité.

Ce faisant, la Haute juridiction facilite les recours contre l’autorité sanitaire en matière de dommages causé par les dispositifs médicaux comme ils l’ont été lors de la mise en cause de médicaments, au risque peut-être de méconnaître la difficulté de l’exercice. Il est en effet dans l’esprit et la lettre de la jurisprudence de subordonner l’appréciation de la faute à la complexité des missions de police. Si une faute simple suffit en principe à engager la responsabilité de l’Etat dans l’exercice de ses pouvoirs de police phytosanitaire[33], il est autorisé à faire valoir qu’en présence d’activités complexes, telles que la lutte contre les maladies contagieuses, seule une faute lourde peut engager sa responsabilité de ses services[34].

On comprend ainsi pourquoi, à en admettre le principe, le juge est particulièrement attentif à en circonscrire la reconnaissance par une analyse fine et séquencée du comportement effectif de l’AFSSAPS au moment des faits.

II. Le rejet circonstancié de la responsabilité de l’Etat pour carence fautive

Dès lors que l’ANSM n’intervient pas dans le processus de mise sur le marché, le principe du marquage CE suppose une surveillance ex post du marché efficace et active, qu’elle intervienne « à froid » dans le cadre d’une évaluation du bénéfice/risque ou « à chaud », à la suite de signalements[35].

Le système suscite des réserves, que reprend la Cour des comptes : « si les médicaments  font  l’objet  d’une  vigilance  ancienne,  restructurée  ces  dernières années, mais encore perfectible, la vigilance des dispositifs médicaux mériterait, quant à elle, d’être clairement renforcée », et ce alors même que le secteur concentre actuellement l’essentiel des mesures de police[36]. Toute défaillance doit donc être mesurée à l’aune des circonstances, des moyens mis en œuvre et des informations pertinentes disponibles au moment des faits. Cette appréciation conduit le juge à réfuter, dans les deux dossiers en cause, toute faute de l’Agence, clôturant par là même ce volet contentieux.

A. Une appréciation de la chronologie des faits au bénéfice de l’ANSM

L’une et l’autre des requérantes, comme bien d’autres devant les différents tribunaux administratifs saisis, demandaient la condamnation de l’Etat à réparer les préjudices subis, invoquant la carence fautive de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé dans l’exercice de sa mission de contrôle et de police sanitaire des activités de la société Poly Implant Prothèse.

1. Temporalité du contrôle et responsabilité de l’AFSSAPS

Deux remarques s’imposent en préalable. La première pour rappeler que la carence peut résider aussi bien dans le défaut d’action des autorités que dans l’insuffisance de leurs interventions, mais non, en principe, dans leur inefficacité, l’obligation d’agir ne relevant que d’une obligation de moyens. La seconde pour souligner la difficulté à démontrer la carence et l’incurie, comportements en négatif, souvent insaisissables, se dérobant à l’examen probatoire et mobilisant comparaisons et confrontations diverses dans une temporalité parfois complexe à stabiliser. Les contentieux de police sanitaire supposent à cet égard du juge, ainsi que le soulignait le rapporteur public, « qu’il définisse lui-même, en creux, ce qu’était une réponse appropriée à l’évènement et ils participent à ce titre de la construction empirique de la police sanitaire ».

Pour juger du comportement de l’Agence dans la surveillance de la société PIP, les juridictions successivement saisies ont décrypté la chronologie des faits et des actions, telle qu’analysée précédemment dans le rapport rédigé à la demande du ministre de la Santé[37].

Les arrêts distinguent ainsi trois temps dans la surveillance opérée par l’AFSSAPS : jusqu’en avril 2009, celui de la « vigilance ordinaire »,  qui, à partir des déclarations et le bilan des incidents relatifs aux implants PIP, ne relève rien d’anormal ; celui des premiers signaux et de la suspicion, en octobre et novembre 2009, débouchant sur la convocation de la société le 18 décembre 2009  et les demandes d’informations complémentaires; celui de l’enquête enfin, en février 2010, de la révélation de la fraude et finalement de la suspension et du retrait en mars 2010.  Il restait au juge à placer le curseur entre l’action attendue et l’inaction coupable, afin de déterminer à quelle date précise le comportement de l’Agence pouvait être qualifié de carence fautive, « datation fine (…) pourtant cruciale s’agissant d’implantations qui sont intervenues en continu pendant près d’une décennie »[38].

Ce faisant, il évite les pièges tout à la fois de l’impression déformante causée a posteriori par la connaissance de faits alors dissimulés aux autorités de contrôle et de la généralisation hâtive par analogie avec des contentieux récents similaires. On peut en revanche questionner l’absolution que l’analyse conduit à délivrer à l’Etat face à un comportement de l’Agence qui, à n’en pas être jugé fautif, laisse songeur quant à sa réactivité.  

2. De l’incidence de l’information sur la responsabilité

L’examen chronologique, dans ce qu’il établit concrètement, va ainsi se révéler décevant pour les victimes en dédouanant l’Agence de toute responsabilité fautive. On sait que l’initiative d’agir est déterminée par l’état des connaissances dont dispose alors l’autorité sanitaire sur les risques-bénéfices du produit, sur sa composition, comme sur la pérennité de ses propriétés et qualités ; il appartient à l’Administration de se tenir informée, de vérifier les informations émanant des laboratoires, de se donner les moyens de susciter l’expertise visant à corroborer ou renforcer l’état des savoirs et d’agir en cas de signalement mettant en cause la sûreté du dispositif médical. Il apparaît en l’espèce que ce n’est que lorsqu’elle a eu connaissance d’informations réellement préoccupantes, précisément en octobre et novembre 2009, que l’Agence a sollicité la société, avant de diligenter, face à l’insuffisance des explications fournies, une inspection en mars 2010 dont les résultats l’ont conduite à suspendre puis à retirer du marché les prothèses PIP le 29 mars. Cette chronologie, drastiquement établie, règle le sort des requêtes des requérantes dont aucune, sans doute, n’arrivera à terme sur ce terrain de responsabilité.

En effet, en 2006, très en avant du scandale, lorsque Mme K… a été opérée, l’AFSSAPS, en sa qualité d’autorité uniquement chargée de la matériovigilance, ne disposait que d’informations normales, sans constat de problèmes autres que ceux habituellement identifiés pour les prothèses de même sorte, et certainement pas de nature à éveiller le soupçon d’un danger ou d’une absence de conformité des implants commercialisés. D’autant que les prothèses étant des dispositifs de série et leur rupture éventuelle un événement « attendu », « elles n’appellent pas une évaluation individuelle mais une surveillance de leur fréquence de survenue »[39], laquelle, s’agissant des implants PIP, ne suscite pas à l’époque d’inquiétude particulière.

En revanche, au moment où Mme I…E… s’est fait poser dans le cadre d’une reconstruction mammaire, des implants PIP, le 30 novembre 2009, l’AFSSAPS est déjà alertée : les données de matériovigilance de l’année 2008, dont l’analyse utile est sortie en avril 2009, font apparaitre une augmentation significative des incidents et notamment des cas de rupture des membranes ; dès octobre 2009, les alarmes se suivent : le 26 octobre, l’agence reçoit successivement un courrier d’alerte, une délation interne à PIP sur les matières utilisées,  et le directeur  lui-même est personnellement saisi début décembre par un  chirurgien sénologue « de sa connaissance »,  ce qui contribuera à accélérer la procédure auprès de la société PIP. Le Tribunal administratif de Besançon va ainsi déceler, dans cette suite de signaux non suivis d’action, un manque de diligence de l’AFSSAPS, constitutif d’une carence fautive de nature à engager la responsabilité de l’Etat. C’est une toute autre analyse que livre le rapporteur public du Conseil d’Etat après un décryptage minutieux des faits : dans l’appréciation des réactions successives de l’Agence, la période critique -à savoir les quelques semaines entre octobre 2009 et le moment de la convocation de la société qui acte publiquement la mise en cause de la société PIP, le 18 décembre 2009-  n’en est pas une pour le juge, ce qui le conduit à exclure, également ici, toute défaillance de l’autorité sanitaire : l’agence a fait preuve d’une diligence normale dans le traitement des informations et des alertes qui lui étaient transmises durant cette période à propos des implants litigieux. Si l’on peut entendre l’argument de la prévalence d’un examen rigoureux des faits sur l’attraction d’une lecture compatissante des requêtes, encore faudrait-il être assuré du premier. Or, à l’instar de la lecture qu’en firent précédemment les premiers juges, et au vu de l’expérience –acquise ( ?)- des précédents scandales sanitaires, le temps de réaction de l’Agence, dès le moment où les premières informations qui lui parviennent,  peut susciter la perplexité.

Quoiqu’il en soit, effet en retour immédiat, le Conseil d’Etat verrouille toute possibilité d’engager la responsabilité de l’Etat sur le fondement d’une éventuelle carence dans sa surveillance des prothèses PIP.

B. La gageure de l’action contentieuse des victimes

Les leçons à tirer de l’analyse chronologique des faits par la haute juridiction sont radicales, interrogeant dans la foulée les solutions qui restent à la disposition des victimes, au terme de ce que l’on a pu qualifier de leur « long chemin de croix »[40].

1. Les leçons à tirer

Ce n’est donc pas par la mise en cause de la matériovigilance que les victimes des implants mammaires PIP pourront obtenir indemnisation de leurs préjudices. Que soit visée l’absence de faute de l’AFSSAPS par le Conseil d’Etat[41] ou l’impossibilité d’établir, comme le notèrent les certaines juridictions administratives, un lien de causalité entre l’invocation d’une carence et les préjudices subis[42], les arrêts rendus sur la responsabilité de l’Etat dans cette affaire ont été, pour reprendre l’image utilisée par Vincent Vioujas, autant de portes entrouvertes débouchant sur des culs-de-sac[43].

Sur le plan juridique, le raisonnement adopté a toutefois permis au Conseil d’Etat de transposer à la matériovigilance le principe d’une responsabilité pour faute simple de l’autorité sanitaire, déjà dégagé pour l’hémo puis la pharmacovilance. Il participe également, dans un contexte réglementaire évolutif, de la clarification des compétences entre les institutions en charge du contrôle des dispositifs médicaux, répartition renforcée par les nouveaux règlements. Tirant les enseignements de la crise qui a suivi l’affaire PIP, le règlement (UE) 2017/745 intègre explicitement les prothèses mammaires dans la classe de risque la plus élevée (5.4. Règle 8 : reprise de la directive 2003/12/CE du 3 février 2003). Et pour répondre aux critiques martelées dans l’enquête Implants files sur les lacunes des procédures de mise sur le marché des dispositifs médicaux présentant un risque pour la santé humaine, singulièrement les implants, le règlement européen, à défaut d’introduire une procédure d’autorisation de mise sur le marché mal adaptée aux caractéristiques de produits et d’« un univers technique où les évolutions sont essentiellement incrémentales »[44], instaure une procédure d’examen approfondi (scrutiny) préalablement à la commercialisation des dispositifs implantables de classe III.

Sur le plan contentieux, la position du Conseil d’Etat pose une solution qui devrait conduire à l’annulation des procès administratifs encore en cours contre l’Etat[45] et renvoie ainsi les victimes à d’autres prétoires. A cet égard, les regards se tournent une fois encore vers  TüV Rheinland, géant mondial de la certification, société prospère et de surcroît bien assurée[46], dont les négligences pourraient enfin permettre aux victimes de trouver un responsable solvable. La CJUE n’en a pas exclu la mise en cause[47], et c’est à la cour d’appel de Paris, appelée à statuer en tant que cour de renvoi[48], de se prononcer désormais sur la responsabilité civile du certificateur.

2. Les suites à attendre

Surtout, le dossier des dispositifs douteux ou défectueux, des lacunes de l’information comme des insuffisances de la matériovigilance ou des errements de la répartition des rôles dans le cycle de vie de ces produits de santé, est loin d’être clos. Les vigilances ont été densifiées autour des implants mammaires[49].

Surtout, de nouveaux contentieux sont d’ores et déjà engagés. Le plus connu d’entre eux est certainement celui des implants de stérilisation définitive Essure que porte une nouvelle action de groupe initiée par l’association RESIST (Réseau d’entraide, soutien et informations sur la stérilisation tubaire) contre la société Bayer afin de démontrer la défectuosité du produit et le défaut d’information qui l’accompagne[50].

Selon le Wall Street, la firme pharmaceutique a d’ores et déjà déboursé, pour éviter le procès aux Etats-Unis, 1,6 milliard de dollars destinés à dédommager 90 % des 39 000 plaignantes américaines. En France, l’ANSM, après avoir mis le dispositif sous surveillance en 2015, a préconisé en 2017 de ne plus l’utiliser « par mesure de précaution » et demandé aux laboratoires de « procéder au rappel des produits en stock »[51]. Plusieurs actions sont donc aujourd’hui en cours, au pénal comme au civil, dont certaines lancées en février dernier contre l’Etat, quatre anciennes porteuses d‘Essure réclamant notamment, au soutien de leur action, une étude indépendante et des indemnisations.

L’échec des victimes PIP ne préjuge en rien de ce que pourra être l’issue des actions contentieuses contre d’autres dispositifs. Il appartiendra aux juridictions saisies, comme elles l’ont fait pour les prothèses PIP, d’apprécier la pertinence des réactions de l’ANSM à l’aune des informations dont elle disposait sur les dangers suspectés des dispositifs en cause et des moyens d’action qu’elle a mobilisés pour les contrer. A suivre donc.

Vous pouvez citer cet article comme suit :
Journal du Droit Administratif (JDA), 2021 ;
Chronique Droit(s) de la Santé ; Art. 327.


[1]ANSM, « Données PIP Mise à jour des signalements de matériovigilance », Juin 2016.

[2] CE, Sect., 25 juillet 2013, Falempin,  n°339922, D.2013.2438, note M.Bacache, D.2014.47 note Ph.Brun et O. Gout , AJDA 2013.1972, Chron. X. Domino et A.Bretonneau, JCP 2013, note Ch.Paillard. Cass.1re, 26 février 2020, n°18-26.256.

[3] Cass, 1re civ., 12 juillet 2012, Brèque, n°11-17.510, Bull.civ.I, n°165 ; P. Sargos « L’abandon par la Cour de cassation de l’obligation de sécurité de résultat pesant sur les médecins en matière de prothèses défectueuse », JCP 2012.1768 ; JCP 2012, n° 987, note O. Gout et 2066, obs. P. Stoffel-Munc ;  D. 2012. 1610, obs. I. Gallmeister, 1794, note A. Laude; RTD civ. 2012. Chron.737, obs. P. Jourdain ; RGDM 2012, n°45, p.201, note P.Véron ;  Med. et Droit, nov-déc.2013, p.175, note G.Mémeteau ; RDSS 2012, 757, obs. F. Arhab-Girardin .

[4] Cass. 1re civ., 19 déc. 2006, n° 05-15721, D. 2007, p. 2897, obs. P. Brun

[5] Cass crim., 11 septembre 2018, n° 16-84.059. Reste en cours une instruction pour blessures involontaires qui devrait être close dans les mois à venir avec un procès en 2022.

[6] CA Paris, ch. 2, 8 janvier 2016, n° 14/06777, JurisData n° 2016-000126, JCP G 2016, 206, act. J.- Ch. Bonneau, indemnisation de 1000 euros sur ce fondement. A la suite des scandales liés aux implants mammaires PIP et aux prothèses de hanches Ceraver, l’obligation d’information du chirurgien esthétique en cas d’implantation d’un dispositif médical a été renforcée (Décret n° 2015-1171 du 22 septembre 2015 relatif à l’information à délivrer à la personne concernée préalablement à une intervention de chirurgie esthétique et postérieurement à l’implantation d’un dispositif médical ; C. santé publ., art. D. 6322-30-1).

[7] https://www.conseil-etat.fr/arianeweb/#/view-document/?storage=true

[8]Cas des prothèses « métal sur métal », qui alimentent une suspicion plus large réactivée récemment par l’enquête internationale Implant Files.  Recommandation AFSSAPS, Point d’information « Prothèses de hanche ASR du fabricant DePuy, rappelées en juillet 2010 », 1er mars 2012.

[9] Ce règlement renforce les prérequis nécessaires à l’obtention du marquage CE comme les outils de traçabilité et de transparence, en exigeant du fabricant les éléments de démonstration du rapport bénéfice/risque, qui devront satisfaire aux attendus en matière d’évaluation clinique pré et post mise sur le marché, durant tout le cycle de vie du dispositif médical. Cf J.Peigné, « Dispositifs médicaux : le nouvel horizon réglementaire », n° spécial, Bull.306-1,  Santé, bioéthique, biotechnologies, sept.2019 ; SNITEM, « Dispositifs médicaux, nouvelle réglementation », mars 2020.

[10] J. Borowczyk et P. Dharréville, Ass.Nat., Mission d’information relative aux dispositifs médicaux, 6 mars 2019, p.20-22.

[11] TA Montreuil 29 janvier 2019, Mme L., n° 1800068, JurisData n° 2019-001257.

[12]TA Orléans, 9 mai 2019, n° 1703560 ; TA Besançon, 12 novembre 2019, n°1701712 : reconnaissance de la responsabilité ; TA Marseille, 11 mars 2019, n° 1710122 : rejet, au vu de la chronologie des faits, de la demande de la requérante.

[13] A. Leca et A. Lami, Droit pharmaceutique, LEH Editions, 2017.

[14] Ces directives laissent place en 2021 et 2022 au règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux (modifiant la directive 2001/83/CE, le règlement (CE) n° 178/2002 et le règlement (CE) n° 1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil 90/385/CEE et 93/42/CEE) et au règlement (UE) 2017/746 du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et abrogeant la directive 98/79/CE et la décision 2010/227/UE de la Commission.

[15] Sur la base du guide « Guidelines for the classification of medical devices », un dispositif médical non stérile de classe I va bénéficier d’une procédure « allégée » d’auto-certification par son  fabricant,  qui doit déclarer  auprès de  l’autorité compétente du  pays où il  a  son  siège social, que  son  produit  est  conforme  aux  exigences essentielles de santé et de sécurité requises, ceci par  écrit  et  sous  son unique  responsabilité. Cf Medical Device Coordination Group Document, « Guidance notes for manufacturers of class I medical devices », déc.2019.

[16] J. Borowczyk et P. Dharréville, Rapport préc. : « c’est en effet à l’entreprise que revient le soin de définir des conditions de fabrication et d’évaluation de son produit, qui sont auditées et certifiées par l’organisme notifié au regard des normes contenues dans le droit européen. », p.23.

[17] Ibid.

[18] Le 27 février 2020, la Cour fédérale de justice a annulé une décision qui avait rejeté la responsabilité du certificateur TÜV Rheinland, en retenant que la garantie de protection individuelle de la santé des patientes porteuses des implants PIP n’incombait pas seulement au fabricant, la société PIP, « mais aussi à l’organisme notifié » certificateur de ces implants. Voir aussi Peter Rott et Carola Glinski. « Le scandale PIP devant les juridictions allemandes », Revue internationale de droit économique, vol. t.XXIX, n°1, 2015, pp. 87-98. https://www.bundesgerichtshof.de/SharedDocs/Termine/DE/Termine/VIIZR151.html.

[19] Selon les plaignantes, aucun achat de gel Nusil, l’un des seuls autorisés pour les prothèses mammaires, n’est intervenu au cours de l’année 2004 alors même que le produit doit être utilisé dans les six mois…L’enquête a révélé que  l’entreprise PIP se servait pour partie d’un autre gel non autorisé, du silicone industriel de la société Brenntag normalement utilisé dans la composition d’équipements électroniques.

[20] CA Aix-en-Provence, 2 juillet 2015, n°13/22482.

[21] L. Bloch, « Prothèses PIP : le long chemin de croix des victimes », Resp.civ. et assur., 2015, alerte 24.

[22] CJUE, 16 février 2017, Elisabeth Schmitt/TÜV Rheinland LGA Products GmbH, aff.C-219/15.

[23] L’intervention de l’organisme notifié dans le cadre de la procédure de déclaration de conformité « vise à protéger les destinataires finaux des dispositifs médicaux ».

[24]Cass. 1re civ., 10 octobre 2018, n° 16-19430, n° 15-26093, n° 15-26388, n° 15-26115, n° 15-28531, n° 17-14401, JCP G, 26 novembre 2018, n° 1235, note M. Bacache, RDSS 2018, p. 1105, obs. J.Peigné. La Cour de Cassation, ne jugeant pas sur le fond et ne pouvant donc directement condamner TUV a renvoyé la procédure devant la Cour d’Appel de Paris, qui sera chargée de juger en tenant compte de ses indications. Le délibéré de cette dernière est attendu le 20 mai 2021.

[25] Rapport préc.p.39

[26] « Vigilance » déclinée en fonction des produits, pharmaco-, hémato,- infectio-, cosméto-, bio-, réactovigilance, … et donc matériovigilance

[27] Cour des comptes, « L’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) », Communication à la Commission des affaires sociales du Sénat Novembre 2019, p.79 et s.

[28] CE, 28 novembre 2003, Commune de Moissy-Cramayel, n°238349, JCP A 2004, 1053, note J.Moreau, AJDA 2004, p. 989, note C.Deffigier, Dr. adm. 2004, 36 ; RFDA 2004, p. 205 : abstention à prendre une réglementation destinée à lutter contre les nuisances sonores ; CE, 30 mars 1969, Moisan et Cne d’Étables sur-Mer, Rec.143, AJDA 1979, p.29, D.1979, 559, note L.Richer : carence dans le maintien de la sécurité lors d’un tir de feux d’artifice; Sect.13 mai 1983, Mme Lefèvre, Rec.194, AJDA 1983, p.476 concl. M. Boyon : maintien de la sécurité sur les plages ; 12 décembre 1986, Rebora c/ Commune de Bourg Saint Maurice, Rec.281 :  sécurité en montagne ; CE 25 juillet 2015, Baey, Rec. 285 : contrôle des installations classées ; CE, 5e et 6e Ch., 9 novembre 2018, n°411626 : condamnation de la ville de Paris et de l’État pour carence fautive dans l’exercice de leurs missions de protection de la sécurité et de la tranquillité, et de maintien de la salubrité. Récemment, CE 18 décembre 2020, Ministre du Travail / M. A., n°437314 : la responsabilité de l’Etat peut être engagée par une faute de l’inspection du travail dans l’exercice de ses missions de contrôle en matière d’hygiène et de sécurité, en l’espèce, par l’absence de contrôle pendant dix ans du respect des mesures de protection contre l’amiante sur un chantier naval.

[29] CE Ass. 9 avril 1993, D…, G…, B…, Rec.110.

[30] CE 9 novembre 2016, Mme K., n°393108, Mme G, n°393904, Mme Bindjouli et Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits de la femme, n° 393902, 393926.

[31] TA Montreuil, 2 juill. 2020, n° 1704275, n° 1704392, n° 1704394

[32] CE, 16 nov. 2020, n° 431159, point 5.

[33] CE, 7 août 2008, n° 278624.

[34] Aussi, le juge relève-t-il qu’ « eu égard aux difficultés particulières que présentent les mesures prises par les services vétérinaires de l’Etat dans le cadre de la police sanitaire et dans l’intérêt de la protection de la santé publique en vue d’assurer l’exécution d’un arrêté portant déclaration d’infection et compte tenu de l’urgente nécessité d’éviter la propagation de l’épizootie, la responsabilité de l’Etat n’est susceptible d’être engagée qu’en cas de faute lourde»,  CAA Lyon, 22 décembre 2009, n° 07LY02147, Jonnet et Centre Technique d’hygiène ; CAA Nancy, 2 décembre 2004, n° 98NC01732

[35] https://www.ansm.sante.fr/L-ANSM/Surveiller/Surveiller/(offset)/

[36] Préc., p.80 : « 88 % des mesures de police concernent des dispositifs médicaux, produits qui ne font pas l’objet, de sa part, d’un contrôle antérieur à leur mise sur le marché ».

[37] « État des lieux des contrôles opérés par les autorités sanitaires sur la société PIP », févr. 2012.

[38] Concl. V. Villette, préc.

[39] Conseil d’État, préc., n° 431159

[40] L.Bloch, préc. Resp.civ. et assur., 2015, alerte 24, p.3..

[41] Cf également CAA Marseille 18 janvier 2018, 15MA04919 ; 22 juillet 2020, 19MA02102.

[42] Tribunaux et cours administratives, en particulier CAA Nantes, 30 juin 2016, 16NT01255 ; CAA Marseille, 18 août 2016, 16MA01419.

[43] « L’affaire PIP de retour devant le juge administratif », SJEG, 18 février 2019, n°7, p. 316.

[44] J. Borowczyk et P. Dharréville, rapport préc. Ass.Nat. 6 mars 2019, p.25.

[45] TA Montreuil, 29 janv. 2019, n° 1800068, TA Orléans, 9 mai 2019, n° 1703560.

[46] L.Bloch, « Prothèses PIP: la Cour de cassation redonne espoir aux victimes », Resp.civ. et assur. 2018, n°11, Alertes, p.3.

[47] CJUE, 16 févr. 2017, aff. C-219/15.

[48] Cass. 1re civ., 10 octobre 2018, n° 16-19.430, n° 15-26.093, n° 17-14.401.

[49] https://www.ansm.sante.fr/Activites/Surveillance-des-dispositifs-medicaux-implantables/Surveillance-des-protheses-mammaires/(offset)/0. En particulier, depuis avril 2019, l’ANSM a retiré du marché la quasi totalité des implants mammaires macrotexturés et des implants mammaires à surface recouverte de polyuréthane et, par mesure de précaution, recommande désormais l’usage de prothèses mammaires lisses.

[50] L’action souligne que le laboratoire BAYER n’a pas informé les utilisatrices de la composition du dispositif ni de ses effets secondaires liés à la présence de métaux lourds. Elle identifie plus de 2 000 victimes et réclame la consignation par Bayer HealthCare de 45 millions d’euros.

[51] Site ANSM « Surveillance des dispositifs médicaux de stérilisation définitive » ;   « Connaissances scientifiques autour de l’implant de stérilisation définitive Essure : état des lieux – Point d’information », 2 octobre 2020 ;  Communiqué DGS « Surveillance des dispositifs médicaux de stérilisation définitive. Comité de suivi des femmes porteuses du dispositif de stérilisation définitive ESSURE-Présentation du plan d’actions », 17 décembre2020. Il s’agit à ce stade « de caractériser les phénomènes à l’origine des effets indésirables présentés par certaines femmes porteuses d’Essure » et de rassembler toutes les informations de nature à apporter des éléments de réponse aux questions qui restent en suspens. Il est ainsi prévu de créer un registre des effets indésirable pour enregistrer les signalements des patientes.

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Le JDA (Journal du Droit Administratif) en ligne a été (re)fondé en 2015 à Toulouse. Son ancêtre le "premier" JDA avait été créé en 1853 par les professeurs Adolphe Chauveau & Anselme Batbie. Depuis septembre 2019, le JDA "nouveau" possède un comité de rédaction dirigé par le professeur Mathieu Touzeil-Divina et composé à ses côtés du Dr. Mathias Amilhat ainsi que de M. Adrien Pech.